Le monde étrange d'Aloys Alzheimer
Avant de vous parler de Loïc, je dois situer un peu les choses. Nous avons passé 26 ans dans une première maison. Cette maison fut celle de nos enfants. Nous l'avons vendu en 2007, car il y avait beaucoup de travaux à faire, et 5000 m² de terrain. A l'époque je travaillais encore, et je ne me voyais pas gérer une équipe d'artisans. JM était déjà retraité, mais il est évident qu'il n'aurait ni la poigne ni la volonté nécessaires pour gérer ces travaux. Tout cela n'avait rien de "technique" au sens où il l'entendait. Ensuite, nous avons envisagé de construire une seconde maison sur le même terrain, ce qui était possible au regard des différents règlements. Mais au quatrième refus de permis de construire, nous avons jeté l'éponge. Nous avons fait intervenir un architecte des bâtiments de France, qui n'a pas compris les différents refus. Une sombre rivalité entre la DDE et le maire de la commune nous a décidé à vendre et à partir ailleurs. Donc, un gros premier tri avait été fait, en particulier pour tout ce qui concernait nos enfants qui avaient déjà récupéré leurs propres affaires.
La seconde maison (2200 m² de terrain) fut plus celle de nos petits-enfants. Une maison de vacances pour eux. Il y avait donc beaucoup d'objets, d'ameublement qui les concernaient. Mais au bout de 15 ans, ils avaient grandi, et lits bébés, tables à langer, chaise haute.... devenaient inutiles. Il y avait aussi tous les jouets, tous les jeux, touts les produits nécessaires aux "zactivtés manuelles" qui les concernaient. Je me suis donc lancée dans une grosse opération de tri, regroupant ce qui servait aux activités dans des sacs en plastique, les étiquetant, et les emportant chez Emmaüs. Je n'ai conservé que les activités de grands : sculpture sur pierres, pyrogravure, mosaïque, vitrail. Il m'a tout de même fallu négocier à propos des tracteurs avec lesquels ils ont joué des heures et des heures, en "faisant des travaux". J'ai réussi à les convaincre de donner ces tracteurs : "Bon, si tu dis qu'ils font faire plaisir à des enfants qui pourront jouer avec, on veut bien..."
Cette parenthèse étant fermée, je vais vous parler de Loïc. J'utilise son prénom, et non ses initiales, car je ne pense pas qu'il puisse être identifié.
Vivre à la campagne, dans une ancienne ferme, cela signifie avoir des bâtiments à disposition. Cela incite à y entreposer des "choses", des tas de "choses". Petit à petit, JM avait étendu son territoire, au-delà de l'atelier. Nous avions une remorque, et j'ai commencé à remplir la remorque avec des cartons, des trucs, des bidules, qui n'avaient pas été touchés depuis 15 ans (notre arrivée dans la maison). Rapidement, j'ai compris que je n'y arriverais pas. Trop lourds, trop de trucs : il m'aurait fallu multiplier les voyages avec la remorque. Et en plus, je suis tétanisée à l'idée de conduire une voiture à laquelle est attelée une remorque, ce qui ne facilite pas les choses...
Et là, (musique et feu d'atifice de rigueur), on nous a présenté Loïc, que j'appelle un débarrasseur de bouis-bouis. Un brave gars, avec toute la sympathie de ce qualificatif. Il a pris la mesure du travail, et m'a dit qu'il avait vu bien pire, et que rien n'était désespéré. Il a vu le bateau, et a convenu qu'il fallait le découper pour le faire disparaître. Surtout, il a compris la situation en quelques mots et m'a dit qu'il ferait le travail proprement, sans que JM se rende vraiment compte de ce qu'il se passait. Loïc a un emploi et est auto-entrepreneur le soir, le week-end, pendant ses vacances et pendant ses RTT. Il est surtout passionné par ce qu'il fait ! Là où moi je ne voyais que tracas, luiI trouvait tout cela très intéressant ! l a tenu parole. Le bateau a disparu très vite. J'ai occupé JM dans la maison pendant le travail de découpe. Loïc a chargé les morceaux dans un van fermé et les a emporté. Plusieurs jours plus tard, JM a réalisé que le bateau n'était plus là. Il a eu un moment de regret, de tristesse. Mais il savait que ce bateau était condamné.
Assez vite, Loïc a débarrassé ce que nous appelions "le garage" (mais qui n'en était pas un). Puis l'ancien laboratoire de la ferme (là où était stocké le lait), et le poulailler... Oui, il y avait un poulailler ! Le tout calmement, sans bruit, avec méthode : un vrai pro ! J'ai aussi fait pas mal de voyages vers la déchetterie, en particulier avec tous les produits "chimiques" qu'il n'était pas question de transporter, et qui au fil des ans s'étaient accumulés.
Il restait l'atelier. L'atelier que je décrirais comme un immense bazar. Il y en avait partout : sur les établis, dans les étagères, et parterre ! Difficile de se déplacer dans ce lieu...Et là, pas d'autre solution que m'y atteler moi-même avec JM. Par moment, il était triste, voir désespéré. A d'autres moments, il a fallu que j'intervienne pour qu'il ne jette pas certaines choses, comme les skis de son père, avec une logique implacable : "Je ne ferais plus de ski, alors ils ne servent à rien".
Donc, me voilà, moi qui n'y connais rien, moi qui n'entrais pratiquement dans cet atelier, me voilà investie de tout mettre en boîte !
Je ne veux pas divulgâcher la suite, mais nous avons réussi !
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