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Le monde étrange d'Aloys Alzheimer

24 mai 2025 - Des dossiers, des dossiers, des dossiers...

Devenir aidant, sans savoir vraiment ce que cela veut dire, sans que personne ne puisse réellement vous l'expliquer.

"Le meilleur médicament, c'est vous !". "Vous devez prévoir ce qui se passera, au cas où..." : des injonctions de médecins, qui terminent en général par un bienveillant "Au revoir, Madame. Bon courage".

S'adapter en permanence, faire preuve d'imagination, innover, faire deux pas en avant, puis repartir en arrière. Répéter, répéter, répéter : où va-t-on ? Pourquoi ?

Toujours faire passer son intérêt avant le mien, toujours réfléchir à l'impact qu'aura telle décision sur sa vie, son ressenti.

Tout gérer, de l'achat du papier toilette à la décision de déménager. Tout prévoir, tout organiser, tout contrôler.

Trouver de nouvelles activités, pour ne pas l'entendre dire d'un air triste : "J'ai plus rien à faire !". Lui demander si telle activité lui convient toujours. Parfois, il se lasse d'une activité qui l'avait emballé. Chercher sur internet de nouvelles idées, en espérant qu'elles lui conviennent.

Affronter les soignants, même les mieux disposés : leur faire comprendre que JM est là, en face d'eux, et qu'ils doivent s'adresser à lui, pas à moi. Même s'il ne comprend pas tout et ne retient pas grand-chose de la conversation. Je suis assise à côté, j'entends ce qui se dit !

Expliquer ce qu'est l'Habilitation Familiale Générale : tutelle, curatelle, ça oui, c'est connu. Mais l'Habilitation ?

Disserter sur les arbres, les fleurs, les petits oiseaux. Ne plus avoir de vrai dialogue, ne plus s'engueuler !

Me souvenir que ses goûts changent : ce qu'il aimait hier, il n'en veut plus aujourd'hui.

Passer plus d'une heure pour aller à la pharmacie, ou chez le boulanger, doucement, tout doucement. Il doit marcher, c'est important. Mais son "rayon d'action" se réduit. Alors, je scinde les courses : un jour le primeur, un jour le marché, un jour le boucher, un jour le boulanger. Surtout ne pas oublier le petit plaisir : aller boire un café ou un chocolat, parfois accompagné d'une petite douceur.

Entendre sans arrêt "Et surtout, prenez soin de vous !". Comment ? Quand ?

C'est usant, fatigant, stressant.

C'est notre vie, c'est sa vie, c'est ma vie. Et nous avons la chance de la vivre ensemble.

Mais il y a un sujet qui me fait sortir de mes gonds : les dossiers, à remplir, à compléter, aux multiples documents qui doivent être annexés. Dossiers envoyés, et dont la réponse arrivera dans un mois, dans trois mois ou dans six mois. Là, oui, je n'en peux plus !

Nous en sommes à cinq certificats médicaux "officiels", qui posent les mêmes questions, mais pas dans le même ordre, et surtout "Il faut utiliser le bon Cerfa, sinon le dossier ne passera pas". Certificats qui arrivent tous à la même conclusion.

La dernière, qui me fait bondir : la banque ! Il faudrait que l'ouvre un compte pour chacun de nous, et que je ferme le compte joint, celui où tout se passe, où tout arrive et d'où tout repart ! Là, j'ai envie de hurler ! Ce compte est ouvert depuis au moins quarante ans. Rien qu'à l'idée du nombre de démarches à faire pour modifier nos coordonnées bancaires pour tout ce qui est prélèvements automatiques, je craque ! J'ai envoyé un courrier à la Juge, pour ne pas fermer ce compte joint, au vu de notre situation familiale et de notre contrat de mariage. Réponse quand ? Seuls les dieux de la Justice le savent. J'ai appelé ma conseillère à la banque. Je lui avais remis ce courrier. Elle m'a expliqué en avoir fait part à son service juridique. Et qu'en attendant, on garde le statut quo. A condition que le service juridique ne prenne pas la main. Et que le compte soit fermé d'office ou la carte bancaire invalidée...

J'ai rencontré des personnes compréhensives, à l'écoute, prêtes à m'aider. Mais aider, ce n'est pas faire, ce n'est pas attendre les réponses.

La maladie, c'est comme ça, c'est la vie. Cela pourrait être bien pire, car JM est toujours calme. Il ne déambule pas la nuit, ne cherche pas à sortir seul de la maison.

L'administratif, c'est autre chose : une chape de plomb qu'ON pose par-dessus une autre chape de plomb, sur les épaules de l'aidant.

 

 

 

 

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