Le monde étrange d'Aloys Alzheimer
Quand manger devient un problème. JM n'est pas difficile. Le plus souvent, il apprécie ce que je cuisine, malgré mes piètres talents de cuisinière. Il mange presque de tout, apprécie beaucoup les crudités, préfère le salé au sucré - sauf pour les tartes aux pommes !
Tout irait bien, si depuis quelques mois JM ne s'étranglait pas si souvent. Et là, les choses empirent. Nous avons acheté une "machine à bulles", pour transformer l'eau plate en eau gazeuse. Parce que l'eau gazeuse est toujours salée. Par chance, il aime l'eau gazeuse. Quand il commence à s'étrangler, un verre d'eau gazeuse le calme.
J'ai compris que cela ne suffirait pas. Sur les conseils du médecin, nous avons consulté un ORL. Assez fière d'avoir décroché un rendez-vous rapidement. Il a posé un diagnostic : diverticule de Zenker. JM a passé un premier examen, qui a confirmé le diagnostic. Il ne s'agit pas de fausse route, mais d'aliments qui s'accumulent : le réflexe de déglutition ne se fait plus correctement. Cet examen est assez perturbant, mais JM l'a bien supporté. L'ORL a alors prescrit un deuxième examen, pour être certain de son diagnostic.
Pour lui, soit le problème est dû à l'âge, soit il est lié à Alzheimer. Il nous a parlé d'une opération. Tout de suite, JM a réagi. "Je ne veux pas me retrouver avec un trou dans la gorge.". De retour à la maison, j'ai fait des recherches sur cette opération. En fait, il ne s'agit pas d'une opération "gorge ouverte", mais d'une opération qui passe par les voies intérieures, à l'aide de canules. Pour le moment, nous n'en savons pas plus, mais cette idée nous a rassurés.
Au cours d'un repas, j'ai remarqué que JM chipotait, mangeait très lentement. "Tu n'aimes pas ?". Et, il s'est mis à pleurer. "J'y arrive pas, je ne peux pas avaler".
La situation empire. En attendant les résultats du deuxième examen, je modifie ce que je lui propose. Plus de viande rouge (sauf de la joue de bœuf), plus de porc, même le canard pose problème (mais pas le foie gras !). Le poulet passe encore, de même que le poisson. Si la consistance est trop pâteuse, trop difficile à avaler, je fabrique une sauce maison, à base de lait de soja et de crème fraîche, pour rendre le tout plus liquide. Et les choses se passent mieux. Je pense m'équiper d'un blender, car mon mixeur actuel ne convient pas. Il ne peut plus avaler de pommes, par exemple. Même son aliment sacro-saint, le pain, pose problème.
Donc, à nouveau, j'ai été confrontée à ses larmes, comme un enfant qui a peur de se faire disputer s'il ne finit pas son assiette. Et toujours en arrière-plan, la conscience de sa situation qui se dégrade.
Aloys, Aloys, tu nous en fais voir de toutes les couleurs...
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